23 % plus performants : les salariés flexibles sont-ils l’avenir de l’entreprise ?
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Une rue dynamique de Londres, reflet d’une nouvelle organisation du travail, entre liberté et diversité. |
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Télétravail, horaires aménagés, semaine de quatre jours : la flexibilité n’est plus un luxe mais une exigence. Dans un contexte où l’attractivité des entreprises est soumise à rude épreuve, les politiques RH doivent s’adapter à une réalité qui place l’équilibre vie pro/vie perso au cœur des priorités. Un levier de fidélisation et d’engagement à ne pas négliger.
I. La flexibilité au travail : un impératif post-pandémie
La pandémie de Covid-19 a accéléré une mutation déjà amorcée : la remise en question du cadre de travail traditionnel. Selon une étude menée par Gallup en 2024, 68 % des salariés dans le monde déclarent que la possibilité de travailler de manière flexible influence leur choix d'employeur. En France, les attentes convergent vers plus de liberté dans l'organisation du temps et du lieu de travail.
La “grande démission” et les tensions sur le marché du travail ont agi comme révélateurs. Le modèle de l’entreprise rigide, centré sur le contrôle et la présence physique, montre ses limites. Place désormais à des organisations qui valorisent l'autonomie, la confiance et l'individualisation des parcours professionnels.
II. Pourquoi la flexibilité est devenue un levier d’attractivité RH
Pour les DRH : alignement stratégique et marque employeur
Le lien entre flexibilité et attractivité RH est désormais évident. Permettre aux collaborateurs de moduler leur rythme de travail devient un argument différenciateur. C’est aussi une réponse directe aux enjeux de rétention : un salarié qui peut ajuster ses horaires ou télétravailler deux jours par semaine sera moins enclin à changer d’entreprise.
D’un point de vue stratégique, cela permet de bâtir une marque employeur moderne, en résonance avec les attentes des nouvelles générations. Pour les DRH souvent confrontés à un turnover élevé et à des difficultés de recrutement, la flexibilité devient une arme de séduction massive.
Pour les managers : un levier de performance et de cohésion
Sur le terrain, les managers qui adoptent des modes de gestion plus souples constatent une hausse de la productivité et de l’engagement. Une étude de BCG France montre que les équipes hybrides bien accompagnées sont 23 % plus performantes que leurs homologues en présentiel exclusif.
La flexibilité permet également de désamorcer certains conflits internes et de répondre aux besoins individuels. À condition que les managers soient formés à ces nouvelles pratiques.
Pour les collaborateurs : autonomie et bien-être
Pour les salariés en quête d’évolution professionnelle, la flexibilité n’est pas qu’un avantage : c’est un critère fondamental. Pouvoir choisir son rythme, préserver sa santé mentale et concilier ambitions et vie personnelle devient un moteur de motivation. C’est aussi une manière de mieux se projeter dans une entreprise qui reconnaît leurs besoins et leur individualité.
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Face à la skyline de la City, la flexibilité s’incarne dans un équilibre entre productivité et cadre de vie agréable. |
III. Quels types de flexibilité privilégier ?
1. Flexibilité spatiale
Le télétravail reste le modèle le plus plébiscité. Qu’il soit partiel ou total, il permet une meilleure concentration, une réduction du stress lié aux transports et une autonomie renforcée. Certaines entreprises optent pour un travail hybride structuré, d'autres pour un mode entièrement distribué.
2. Flexibilité temporelle
Horaires décalés, semaine de quatre jours, annualisation du temps de travail : ces dispositifs offrent plus de souplesse aux salariés, tout en permettant à l’entreprise d’optimiser ses ressources. La semaine de quatre jours, testée en France par plusieurs PME, affiche des résultats prometteurs : baisse de l’absentéisme, hausse de la satisfaction.
3. Flexibilité organisationnelle
Donner plus de latitude dans l'organisation quotidienne du travail est une forme de reconnaissance. Cela peut passer par la co-construction des plannings, le droit à la déconnexion, ou encore une culture de la responsabilisation. Des entreprises comme Alan ou Shine ont adopté ces modèles avec succès.
IV. Mettre en place la flexibilité : les conditions de réussite
Adopter une culture flexible ne s’improvise pas. Cela nécessite une stratégie RH globale et progressive.
Pour les RH : il s’agit de réaliser un diagnostic des besoins internes, de définir des règles claires et d’assurer un cadre juridique solide.
Pour les managers : formation à la gestion d’équipes hybrides, développement de soft skills comme l’écoute active, mise en place de rituels adaptés (1:1, réunions asynchrones, etc.).
Pour les collaborateurs : il faut garantir l'accès à des outils collaboratifs performants, sécurisés et faciles à utiliser, tout en favorisant la montée en compétences.
✔️ Bonnes pratiques :
Créer une charte du télétravail claire et
évolutive
Favoriser l’auto-planification avec des plages de
synchronisation obligatoires
Mettre en place des feedbacks réguliers
(baromètres, sondages)
Mesurer l’impact sur les indicateurs RH
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Mobilité
et rythme flexible dans le quotidien londonien. |
V. Les freins et résistances à surmonter
Malgré les bénéfices prouvés, la flexibilité suscite encore des craintes profondes dans certaines organisations.
Le présentéisme reste ancré, notamment dans les secteurs traditionnels. Certains managers expriment une perte de contrôle et une difficulté à évaluer le travail sans présence physique.
Les inégalités d’accès à la flexibilité (entre cadres et non-cadres, métiers sédentaires et terrain) peuvent aussi générer des tensions sociales.
Les risques psychosociaux liés à l’isolement ou à la surcharge cognitive doivent être anticipés. Le droit à la déconnexion et l’équilibre doivent rester des priorités.
Comme le souligne Claire Dubois, DRH dans une ETI industrielle : « La réussite de notre politique flexible tient au dialogue permanent avec les équipes et à la clarté du cadre posé. Sans cela, on tombe dans le flou et la frustration. »
VI. Flexibilité et performance RH : les indicateurs à suivre
Mettre en place une politique de flexibilité performante implique de mesurer ses effets sur le long terme. Parmi les principaux KPIs suivis par les services RH :
Taux d’absentéisme
Turnover volontaire
Employee Net Promoter Score (eNPS)
Productivité par collaborateur
Baromètre d’engagement
Ces indicateurs permettent d’objectiver les résultats, d’ajuster les dispositifs et de communiquer auprès des directions générales.
Par ailleurs, la flexibilité s’inscrit pleinement dans les politiques RSE et QVCT, en renforçant l’engagement sociétal et la qualité de vie au travail.
VII. Conclusion – Vers une culture de la confiance et de la responsabilité
La flexibilité au travail n’est plus une option, c’est un nouveau socle du contrat social en entreprise. Elle répond aux besoins d’équilibre des collaborateurs, aux exigences d’adaptation des managers, et aux objectifs de performance des directions RH.
Mais son succès repose sur un facteur central : la confiance. Faire le pari de la flexibilité, c’est reconnaître la capacité des salariés à s’organiser, à produire, à innover. C’est aussi faire évoluer la culture d’entreprise vers plus d’écoute, de reconnaissance et de co-responsabilité.
Et si demain, la flexibilité devenait la norme plutôt que l’exception ?